Naissance et développements (1889-1900)

  • Le laboratoire d’Endoume

L’année 1889 voit enfin l’achèvement, en bord de mer, et après maintes péripéties administratives, Davmar4b-halfde la station de Zoologie marine d’Endoume. Le nouveau laboratoire, édifié sur un promontoire du quartier de Malmousque, à Endoume, domine, outre les anses de Maldormé et des Cuivres, la rade Sud-Est du Prado à l’endroit où débouche la vallée de l’Huveaune, et se trouve en face des îles de Ratonneau, de Pomègue, et du château d’If.

Au mois de juin 1889, Paul Gourret est officiellement nommé au poste de sous-directeur de la nouvelle Station, pour seconder Marion. C’est à l’époque, le seul laboratoire de ce type, non seulement, à se trouver dans une grande ville, mais qui dépend aussi d’une Faculté des Sciences se trouvant sur place, ce qui évidemment est un avantage. Cela facilite les correspondances, qu’elles soient administratives ou purement scientifiques.

L’emplacement de la Station Marine d’Endoume reste la propriété de l’Etat, qui le laisse à la disposition de la Faculté des Sciences de Marseille. L’édifice, quant à lui est la propriété de la Ville de Marseille.

Il se compose de plusieurs corps de bâtiments disposés en croix, et susceptibles de connaître des agrandissements. Le corps principal, dont l’axe est dirigé Nord-Sud mesure 34 mètres de long sur 8 de large. L’ensemble occupe une superficie de 1365 mètres carrés.

L’intérieur se décompose comme suit :

  • Rue de la Douane, une porte d’entrée est pratiquée au rez-de-chaussée, qui donne accès, dans une tour ronde, aux escaliers menant aux différents niveaux.
  • La construction est traversée par des canalisations d’eau douce et d’eau de mer, sauf au deuxième étage qui comporte aussi des arrivées de gaz pour l’éclairage. Des bassins d’eau de mer, sont répartis dans une tour, qui sert de cage d’escalier entre les étages. Le laboratoire d’Endoume dispose aussi d’une cour intérieure.
  • Au sous-sol une pièce obscure sert à entreposer un bassin d’eau de mer, de 3 mètres de long sur 2 de large et ayant 1 mètre 60 de profondeur.Davplana-half
  • Au rez-de-chaussée il y a deux salles, l’une d’elle mesure 15 mètres de long, sur 8 de large, et abrite 12 bacs de 1 mètre cube chacun, servant d’aquariums, tandis que l’autre de dimensions plus modeste, mesure 8 mètres sur 8, formant ainsi un carré. Toujours au rez-de-chaussée,  se trouve le logement du gardien, ainsi qu’une grande salle, où l’on étudie la Biologie générale, la Bactériologie, et la Physiologie zoologique.
  • Le premier étage est occupé par le bureau de A.F. Marion et par une bibliothèque, sans oublier les salles de travail, et une galerie où trônent de grandes armoires qui renferment les collections, en grande partie issues du golfe de Marseille.
  • Au deuxième étage, se trouvent les appartements du directeur, et une vaste terrasse est aménagée et surplombe le bâtiment. Davplanc-half

Rue de la Douane, une porte d’entrée est pratiquée au rez-de-chaussée, qui donne accès, dans une tour ronde, aux escaliers menant aux différents niveaux.

La construction est traversée par des canalisations d’eau douce et d’eau de mer, sauf au deuxième étage qui comporte aussi des arrivées de gaz pour l’éclairage. Des bassins d’eau de mer, sont répartis dans une tour, qui sert de cage d’escalier entre les étages. Le laboratoire d’Endoume dispose aussi d’une cour intérieure.

  • L’aquarium

Au mois de mai 1891, c’est l’ouverture d’un aquarium au laboratoire d’Endoume, ou plutôt des aquariums, en effet, au rez-de-chaussée, on a vu que plusieurs bacs ont été installés qui accueillent une faune aussi variée que possible.

Tout cela s’organise ainsi :
L’eau de mer pour arriver jusqu’au laboratoire, est aspirée par une pompe actionnée par un moteur à gaz, directement dans l’Anse des Cuivres, une calanque abritée, dont l’emplacement est loué au département des Ponts et Chaussées.
L’eau ainsi pompée arrive au deuxième étage, dans six grands réservoirs contenant cette eau de mer, que l’on fait décanter pour la débarrasser au maximum de ses particules en suspension. Puis purifiée, elle est distribuée dans les aquariums des salles du rez-de-chaussée au moyen de canalisations spéciales où l’on peut régler le débit et assurer l’aération. L’installation est ainsi étudiée pour que le trop-plein des aquariums puisse se déverser dans le grand bassin du sous-sol, et par là même servir de réserve. De véritables élevages de poissons d’espèces différentes sont réalisés dans ces aquariums.

  • Le public marseillais: un soutien à l’activité scientifique

La curiosité aidant, le public marseillais, est semble-t-il venu en nombre pour l’ouverture officielle, et la presse locale s’en est fait l’écho. Pour beaucoup, le laboratoire de Zoologie d’Endoume se confond souvent avec l’aquarium. C’est le début de l’aventure des Marseillais avec « leur » Aquarium. Les familles, apparemment, y viennent en promenade le dimanche, pour regarder avec curiosité un monde inconnu, qui pourtant leur est terriblement familier.

  • Entre Zoologie et Zoologie appliquée…

Dès 1889, Antoine-Fortuné Marion, avec la collaboration de Paul Gourret, inaugure un cours de zoologie appliquée au laboratoire d’Endoume. En 1893, les cours en Zoologie appliquée, prennent explicitement le titre de Travaux de Zoologie appliqués à l’industrie des pêches maritimes, dont le contenu va d’ailleurs paraître dans les tome III, IV, et V des Annales du Muséum d’Histoire Naturelle de Marseille.

  • Les cantonnements de réserves

A cette époque, Marion poursuit ses travaux sur l’appauvrissement des zones côtières largement exploitées par des campagnes de pêche intensives. Les règlements alors en vigueur fixent à trois milles au large la limite des eaux, où la pêche est libre de toute entrave. Il propose ainsi, à l’administration maritime, l’aménagement de ce qu’il appelle des cantonnements de réserves, organisés de façon rationnelle, pour permettre le repeuplement des eaux, ainsi que l’aménagement à l’intérieur de ces réserves, « d’enrochements » artificiels qui permettraient à la vie marine de s’y fixer.

C’est ainsi, que sur le périmètre du laboratoire, dans la rade du Prado, le long du chemin de la Corniche, il essaye d’aménager un cantonnement de réserve, en 1894, où il tente notamment de pratiquer la pisciculture marine, mais apparemment sans réel succès. A.-F. Marion constate en effet que, trois ans après la création de la réserve, celle-ci a déjà une influence notable sur les zones environnantes. Mais si elle est supprimée, le problème de l’appauvrissement des fonds, constaté par les pêcheurs eux-mêmes, va de nouveau se poser. Cette situation fait donc ressortir une contradiction : comment concilier l’intérêt à court terme de la pêche, avec une vision à long terme ? Un dilemme d’ailleurs toujours d’actualité.

A.-F. Marion et P. Gourret cherchent donc à ce moment-là, le moyen de faire le lien avec l’industrie des pêches, entre autres dans la région du golfe de Marseille, pour la rationaliser, en partant du principe que les fonds ne sont pas inépuisables. Il s’agit de diffuser les préoccupations de Zoologie appliquée, qui, pense-t-on, s’avèreront utiles aux pêcheurs eux-mêmes.
Marion envisage aussi, à ce moment-là, la création de zones neutres, pour faire tampon entre celles de forte pêche, qui seraient des sortes de réserves internationales permanentes. Il tente également d’organiser dans l’Anse des Cuivres un espace d’élevage de certaines espèces de poissons. Mais là aussi il semble que cette expérience de pisciculture marine ait plus ou moins été abandonnée par la suite.
Au cours de cette période, les méthodes d’investigation et de recherche connaissent de multiples changements. En effet, la multiplication et la diversité des connaissances, aussi bien que l’amélioration du matériel, et le nombre croissant de ceux qui choisissent cette voie, vont faire que, progressivement, une division des tâches va se dessiner.
Et une répartition des problèmes spécifiques dans une zone marine va remplacer la seule démarche d’inventaire biologique que l’on appliquait antérieurement au même endroit. C’est le début de la spécialisation à laquelle arrive toujours une science qui atteint sa maturité.
Au cours de sa carrière, on a vu que Marion a publié de nombreux écrits relatifs à divers groupes d’invertébrés marins (Nématodes, Némertes, Aplacophores…); mais s’est aussi intéressé à la faune pélagique, par exemple à la sardine dont il va étudier le mode de reproduction et le comportement. De ces observations sur le pélagos, il va sortir un nouveau mémoire, Remarques générales sur le régime de la faune pélagique du golfe de Marseille, en 1890.
Ainsi les recherches du laboratoire d’Endoume connaissent une double orientation, d’une part les travaux que l’on pourrait qualifier de « science pure« , selon une expression de Marion, c’est-à-dire conçue comme un simple enrichissement de la connaissance humaine, sans rien en attendre forcément en retour. Et d’autre part un second pôle d’étude cherchant des applications concrètes dirigées vers les enjeux économiques que représente la pêche.
La gestion de cette contradiction apparente entre science fondamentale et science appliquée, pose de nos jours toujours autant de problèmes. Aux scientifiques comme aux autorités administratives. Précurseur en cela, comme en bien d’autres domaines, Marion aura tenté dans son laboratoire, une harmonisation de ces deux approches.

 

La suite…

 

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